Interview de Béatrice CRAMOIX, Conseillère artistique pour le chant - Septembre 2020
La difficulté de la langue française réside en grande partie dans son traitement prosodique qui ne cesse de changer en fonction de la place du mot dans la phrase. Chaque concept français a une syllabe longue et s’il n’en a qu’une, elle est longue (nuit, jour, temps…)
Dans la poésie et notamment l’alexandrin que la tragédie lyrique favorise, on a ainsi des suites de syllabes dont on doit être capable de déterminer la qualité (longue ou brève) afin de trouver le rythme de la phrase. L’alexandrin considéré comme parfait est le vers de douze pieds qui fait se succéder 4 fois 2 brèves et une longue, comme celui-ci, extrait du monologue d’Armide dans Armide de Lully: ‘ ce faTAL enneMY, ce suPERbe vainQUEUR’. Cela demande une grande attention non seulement à l’exécution (chanteurs et même instrumentistes) mais aussi et avant tout lors de la composition de la musique. Les maîtres anciens le savaient, ils utilisaient ces techniques rhétoriques qu’ils transformaient en
rythmes musicaux avec des successions de croches et de noires ou de noires et de blanches respectant le schéma prosodique (il suffit de lire la musique du vers précité pour le comprendre) Ces mêmes maîtres, lorsqu’ils enseignaient, attachaient une grande importance à cette rythmique, demandaient aux interprètes d’en être très respectueux dans leur art.
Béatrice CRAMOIX
Conseillère artistique pour le chant